Article pertinent et utile ici par mon ami et ex-collegue, Ouahcene

      le 4 octobre 2019

par Ouahcene Ourahmoune, Energy Efficiency Director chez Alstom

Défis de l’électromobilité de demain : quels outils pour les collectivités locales, autorités organisatrices et opérateurs de transport

Partie 1 (sur 2)

Contexte et mise en perspective

Depuis les accords de Paris (COP21), de plus en plus de villes et de pays programment la fin de l’utilisation des moteurs Diesel ou à combustion interne à horizon plus ou moins court.

Interdiction progressive du Diesel dans le monde

Dès 2020 pour les autorités les plus ambitieuses ou 2035-2040 pour la majorité des autres. Une majeure partie d’entre eux adoptent un plan d’actions à long terme qui va les amener vers une neutralité carbone d’ici 2050.

Une offre de mobilité durable pour tous engage tous les acteurs du secteur, aussi bien publics qu’industriels, sur le chemin d’une transition écologique de nos modèles de consommation et de déplacement.

En France, la loi de transition énergétique de 2015 impose aux opérateurs de transport public (bus & cars) qu’au moins 50% de leur flotte (véhicules nouvellement acquis ou mis en service) soit à faibles émissions d’ici au 1er janvier 2020 et 100% au 1er janvier 2025.

L’électromobilité est une tendance de fond en Europe et dans le monde, en particulier du fait que des solutions technologiques matures permettent de trouver des équilibres économiques viables.

Les enjeux

Les territoires ont un recours grandissant à l’électromobilité pour le transport public : historiquement pour les réseaux de métros et tramways, maintenant pour les réseaux de bus.

En parallèle les exigences environnementales poussent également les autres types de transport et de mobilité vers des modes électriques : véhicules individuels ; fret urbain ; et à un horizon plus lointain véhicules autonomes et autoroutes électriques.

Enfin, l’urbanisation grandissante va apporter le défi de la croissance du trafic pour tous ces modes de transport, en sus des exigences de conversion permettant d’atteindre les objectifs environnementaux.

En guise d’illustration, voici quelques éléments clés pour comprendre les enjeux liés à certains modes de transport.

Véhicules individuels

La part de marché des véhicules électriques progresse dans la plupart des pays d’Europe et du monde.

L’impact sur les infrastructures va fortement dépendre des usages : le besoin typique pour un véhicule électrique est une recharge partielle de nuit permettant de parcourir quelques dizaines de km dans la journée.

Le choix de la technologie permettant un bon équilibre entre autonomie et temps de charge sera primordial.

L’ADEME prévoit que 70% du parc serait composés en 2050 de véhicules électriques et hybrides rechargeables, dont une vaste majorité avec une recharge à domicile de nuit.

eBus

La stratégie de recharge des bus électriques est déterminée par le profil d’exploitation pour chaque flotte de véhicules.

Alstom - Aptis

Le besoin d’une autonomie garantie dans le temps et sur les diverses missions va déterminer l’énergie à bord et l’infrastructure nécessaire pour charger les véhicules : une recharge lente en dépôt la nuit ; une charge partielle en journée en fin de ligne ; une recharge ponctuelle et opportuniste en ligne ; etc.

Les premiers opérateurs à s’équiper de bus électriques ont fait le choix d’une charge lente, de nuit, en dépôt. Mais sur une flotte importante, la puissance nécessaire peut rivaliser avec celle d’un métro. De plus en plus d’opérateurs font le choix d’une stratégie plus variée.

Dans tous les cas, un pilotage de la charge des véhicules de la flotte, en temps réel dans la mesure du possible, est le garant d’un service fiable et d’un coût d’exploitation optimisé.

Pour les opérateurs ayant une flotte de véhicules hétérogène, le choix d’une technologie garantissant l’interopérabilité entres chargeurs et véhicules est crucial.

Transports ferrés urbains

Les réseaux ferrés urbains sont en majorité déjà électrifiés et contribuent déjà à une mobilité plus durable.

L’un des premiers enjeux est la puissance consommée en heure de pointe.

Les enjeux, hormis la disponibilité de l’énergie au moment voulu, sont alors réduire l’énergie consommée pour chaque passager transporté et km parcouru en adoptant diverses stratégies d’écoconduite ou d’effacement des pics de consommation grâce aux données d’exploitation et aux outils digitaux de simulation et de prédiction.

Les défis

Tous ces modes de transport vont solliciter une même ressource : l’énergie électrique. Pour que les collectivités et autorités organisatrices puissent répondre à ces besoins, elles devront relever les défis suivants :

Anticiper, gérer et éviter tant que possible les pics de consommation

La consommation en heure de pointe pour les réseaux connectés et lors du chargement pour les véhicules non connectés va déterminer la puissance maximale requise pour ces différents usages. La première limitation sera la puissance disponible au niveau du réseau électrique du fournisseur (grid) et la capacité du fournisseur à satisfaire la demande. Une gestion intelligente des pics de consommation est primordiale pour tous les acteurs concernés, y-compris en considérant une optimisation multimodale.

Faciliter l’accès, le raccordement à l’infrastructure et le chargement des véhicules

Au-delà des limites de puissance éventuelles, la disponibilité de l’infrastructure de raccordement et de chargement revêt une importance cruciale, en particulier pour les flottes de véhicules nouvellement converties à la traction électrique. En effet, bien que la plupart des opérateurs choisisse de conserver des modes opératoires similaires pour les bus électriques (par rapport aux bus diesel), certains choix techniques et opérationnels seront cruciaux pour l’équilibre économique et la viabilité d’un réseau d’eBus : stratégie de recharge (statique ou opportuniste) ; de nuit seulement ou également de jour ; quantité d’énergie embarquée ; etc.

Réduire la quantité d’énergie par passager transporté

Une des clés de réussite de toute stratégie d’électromobilité est la capacité à tirer parti des optimisations de consommation électrique des différents véhicules. Certaines études montrent qu’il y a un potentiel de 10% à 20% d’économie pour un même service rendu et sans détériorer le confort passager, en adoptant des modes opératoires et des technologies plus économes. Dans ce cas, les capacités à modéliser, simuler et contrôler la consommation de façon précise prennent une importance capitale.

Favoriser les énergies renouvelables comme sources de production d’électricité

Enfin, les énergies renouvelables prennent une part de pus en plus importante dans le mix énergétique de la plupart des pays et régions. Favoriser davantage leur adoption contribuera à diminuer encore l’empreinte environnementale du transport public. Du fait de la faible prédictibilité des énergies renouvelables éolienne et solaire, leur introduction dans le réseau électrique et/ou à de fins d’autoconsommation nécessite d’adapter certaines architectures et parfois faire appel à du stockage temporaire.

Partie 2 à venir sous peu : solutions, compétences et perspectives.

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