Ville nouvelle, ville intelligente, ville africaine, ville à désengorger Ouagadougou. Il est toujours plus facile de créer une ville nouvelle de toute pièce pour les segments plus aisés de la population du mégapole à côté, que de transformer des quartiers existants d’une ville surpeuplée. 

Cependant, le défi dans bien des villes africaines sera justement de transformer des quartiers step-by-step

                        par Nadoun Coulibaly   –  le 18 juin 2020

Yennenga, les ambitions d’une ville nouvelle aux portes de Ouagadougou [4/8]

Ce mégaprojet immobilier, qui a vocation à désengorger la capitale, offre tous types de logements et nombre d’infrastructures commerciales. À quelques encablures de la capitale, Yennenga qui a déjà accueilli ses premiers habitants pourra en abriter 100 000 d’ici à 2030. Quatrième opus de la sélection JA des projets majeurs de BTP de l’Afrique francophone.

Résumé À 15 km au sud de Ouagadougou, Yennenga – ainsi baptisée en hommage à la célèbre princesse guerrière fondatrice du royaume mossi – mégaprojet immobilier sur 700 hectares, mené par le burkinabè CGE, doit accueillir 100 000 habitants dans dix ans.

Cette agglomération, divisée en 20 000 parcelles, comprendra trois offres de logements – sociaux, économiques et haut de gamme – disponibles à des prix compris entre 8,5 millions et plus de 30 millions de F CFA (entre 13 000 et 46 000 euros), mais aussi un centre commercial, un parc d’attractions et un complexe hôtelier. Certaines parcelles sont vendues à des entreprises et à des particuliers qui mènent leurs chantiers, d’autres à la branche immobilière de CGE, qui construit et commercialise.

Importance stratégique Yennenga entend pallier le déficit de logements, estimé par CGE à 200 000 unités à Ouagadougou. Ce chantier permet de maîtriser le développement urbain de la capitale burkinabè en planifiant bien en amont réseaux et types de bâtiment, en évitant les installations informelles mal connectées à l’eau ou à l’électricité, et en gardant le prix de l’immobilier abordable.

Avancement La ville nouvelle a déjà accueilli ses premiers habitants. « Les 2 600 premières parcelles viabilisées ont trouvé preneur. Désormais, la zone est en plein chantier », indique Brahima Ouattara, directeur général de CGE Immobilier. La viabilisation de la phase 2 (1 500 parcelles) ainsi que les travaux de bitumage de la voie d’accès doivent démarrer dans les prochaines semaines.

Font partie de cette sélection des projets déjà engagés, ayant un impact économique structurant pour leur pays et l’ensemble de la région. Du ferroviaire au portuaire, en passant par les villes nouvelles, les barrages, les axes routiers ou les pipelines, ces chantiers mobilisent des consortiums, souvent menés par des groupes internationaux, principalement chinois et européens. Mais ces derniers font tous appel à des partenaires et à des sous-traitants locaux, dont l’expertise technique a fortement progressé au cours des cinq dernières années.

Les plus expérimentés de ces groupes africains de BTP – tels le marocain SGTM, l’algérien Cosider ou encore le burkinabè CGE – sont désormais eux aussi « chefs d’orchestre » de grands programmes d’infrastructures.

Aussi:

Yennenga, projet de ville nouvelle à 15 kilomètres de Ouagadougou

La ville nouvelle de Yennenga verra le jour à 15 kilomètres au sud de Ouagadougou. Créée en pleine savane, elle accueillera 80.000 habitants sur 678 hectares. Innovante et durable, elle se présente comme la ville africaine du futur face aux défis urbains du continent. Lauréate du concours international en 2017, l’agence Architecture Studio supervisera le projet pour le promoteur CGE-immobilier.

Michel Lachkar  –  Rédaction AfriqueFrance Télévisions   –    le
Ouagadougou, comme d’autres capitales africaines, connaît une croissance anarchique, liée notamment à l’exode rural. Depuis les années 70, la ville n’a cessé de s’étendre, à raison d’une croissance de la population de 7% par an. A ce rythme, 4,7 millions d’habitants sont attendus pour 2025.

Sans espaces verts, ni transports adéquats, le marché immobilier de la capitale burkinabè est aujourd’hui saturé. La ville a largement perdu les charmes de «gros village africain» qui la caractisait dans les années 50.

Pour désengorger la capitale, une ville nouvelle verra le jour, d’ici à 2030, à une quinzaine de kilomètres seulement de Ouagadougou. Le projet Yennenga proposera tous types d’habitats: logements sociaux, logements économiques ou hauts de gammes. La ville accueillera des complexes hôteliers, un centre de conférence, des immeubles de bureau avec l’ambition de développer un pôle d’attractivité régional autour de la capitale. Une coulée verte traversera la ville d’Ouest en Est, mettant en valeur les collines et les arbres existants.

Yennenga, projet de ville nouvelle de 80 000 habitants, au sud de Ouagagougou  
Yennenga, projet de ville nouvelle de 80 000 habitants, au sud de Ouagagougou   (Agence Architecture-Studio)

Concours international
Lauréate du concours international lancé au printemps 2017, l’agence Architecture-Studio en partenariat avec quatre autres cabinets d’architectures (Arcade, Beckam N’Thépé, Coldefy&Associés, Hardel et le Bihan) a conçu son centre-ville dans «une démarche écologique, responsable et inclusive».

La ville comportera un parc de 28 hectares, des axes Nord-Sud connecteront les différents quartiers, définissant des îlots urbains. La ville nouvelle est directement reliée à la capitale par la route nationale 5.

Au Nord, les édifices bloqueront l’arrivée des vents chauds chargés de poussière de l’harmattan; au Sud, ils permettront au contraire au vent doux et humide de la mousson de rafraîchir la ville.

La place de l’eau a également fortement orienté la réflexion. Les eaux de pluies de la saison humide seront récupérées depuis les toitures pentues des bâtiments. L’eau sera stockée par un système enterré de réservoirs permettant d’assurer une bonne partie des arrosages.

Le projet de centre-ville sera construit autour d’une coulée verte et d’une place centrale permettant de «conjuguer ville et campagne». La place de la voiture sera relativisée (…) au profit des circulations douces: transports en commun, vélos, chevaux et piétons.

L’architecture se veut résolument contemporaine, mais ancrée dans la culture burkinabè, avec les matériaux (bois et verre) et des couleurs (rouge orangé de l’argile ou jaune de la paille). Des îlots bâtis de hauteur moyenne (4 étages) dessineront la majeure partie du tissu urbain, avec quelques bâtiments plus monumentaux.

Une conception bio-climatique des bâtiments, basée sur une ventilation naturelle sera la norme. La forme inclinée et relevée des toitures offrira une ombre rafraîchissante aux balcons et saillies.

Une centrale solaire prévue à l’extérieur de la ville alimentera la ville. Des lampadaires urbains photovoltaïques et des panneaux solaires seront intégrés aux bâtiments.

(Agence Architecture-Studio pour CGE immobilier)

L’identité d’une ville
La culture n’est pas oubliée, avec un centre des beaux-arts, un musée et des lieux de culte. Le nom de la ville rend hommage à la princesse Yennenga, figure historique et fondatrice des peuples mossis.

Martin Robain, architecte associé au sein d’Architecture-Studio, résume ainsi l’ambition centrale du projet: «Le projet de Yennenga engage une véritable réflexion sur la ville africaine de demain, sachant qu’il n’existe que très peu d’exemples de villes achevées sur ce modèle. Nous voulons prouver qu’une ville durable, à la fois moteur économique au niveau régional et respectueuse de l’environnement, constitue la réponse au défi de l’urbanisation en Afrique. Un dernier défi a consisté à ancrer la ville dans son patrimoine culturel et à lui conférer une identité propre.»

La croissance des villes en Afrique représente un enjeu sans précédent. On estime que chaque année près de 24 millions d’habitants supplémentaires peupleront les villes africaines d’ici à 2045. Pour l’heure, le taux de pauvreté en ville avoisine les 70% et les inégalités ont tendance à se creuser, si bien qu’il est fondamental de revoir le modèle  d’urbanisation africain.

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