↑  Un bâtiment en blocs de terre compressés conçu par Élémenterre, l’entreprise du Sénégalais Doudou Dème. (Crédits : Elementerre)

Il est évident et essentiel que le développement des villes se fassent par rapport à leur environnement climatique, démographique, économique, historique et culturel.

Ce qui fonctionne ailleurs n’est pas forcément approprié.

                 par Maimouna Dia  –  

L’habitat traditionnel, source d’inspiration pour les cités du futur

Des initiatives émergent pour que les bâtiments des villes de demain soient intégrés à leur environnement et exploitent les ressources naturelles, afin de valoriser le patrimoine architectural africain.

L’architecture des constructions et le choix des matériaux sont deux composants majeurs de la smart city. Du Sénégal au Cameroun, en passant par le Burkina Faso et le Niger, naissent des initiatives mettant l’architecture, l’habitat traditionnel africain et ses matériaux au centre du développement de villes intelligentes en Afrique. Le continent ET ses 45 pays sont dotés d’une diversité culturelle et architecturale à valoriser, à travers la formation, la recherche et l’innovation technologique et le recours à des matériaux « biosourcés ».

Il s’agit de mettre en valeur les patrimoines culturels matériels et immatériels, les industries culturelles et créatives, les systèmes économiques, les innovations contemporaines et technologiques, tout en s’intégrant harmonieusement dans son environnement, explique Amélie Essessé, architecte franco-camerounaise, experte en conservation du patrimoine. L’idée est que la smart city en Afrique s’inspire de l’habitat traditionnel, sachant que l’espace habité en Afrique est régi par des codes en rapport avec les us et coutumes locaux.

Un matériau adapté à la chaleur

« Je ne privilégie pas un matériau à un autre. Ma mission en tant qu’architecte est de concevoir un projet en cherchant à l’intégrer au mieux à l’environnement tout en utilisant les ressources naturelles – terre, sable, bois, bambou, feuilles, fibres, lumière et ventilation naturelle… – ainsi que les potentialités locales, afin d’assurer le confort et la santé des occupants », précise Amélie Essessé.

Une vision partagée par Moussa Abou, architecte-inventeur nigérien et promoteur de la « Méthode Abou de construction en dur sans coffrages en bois, ni serre-joints, ni mortier de pose ». Titulaire de trois brevets d’invention dans le domaine de la construction en dur, il a voulu par ses innovations « contribuer à la création d’emplois et à l’adaptation des constructions aux réalités locales », explique-t-il. La technique consiste notamment à recourir à des éléments préfabriqués sur place à base de composants légers en béton servant de coffrage à la place des coffrages classiques. Elle privilégie des matériaux locaux, moins onéreux et assurant une climatisation naturelle.

Sur ce filon de la promotion des constructions à base de ressources locales, le Sénégalais Doudou Dème, fondateur de l’entreprise Élémenterre, a fait de la terre sa principale source de travail, en utilisant la technique du bloc de terre compressée, un matériau climatisé et adapté à la chaleur. Au Burkina Faso, l’architecte Francis Kéré prône des constructions inspirées des structures en bois et en paille sacrées des communautés Dogon. Il fait également la promotion d’écoles respectueuses de l’environnement et du climat africain.

Pour la Sénégalaise Mamy Tall, architecte et militante pour le développement de constructions durables, la réussite de ces initiatives dépendra de la propension des États à valoriser et à intégrer ces travaux dans des projets de développement structurés, mais aussi de la capacité des architectes africains à stimuler la recherche, à innover avec ces matériaux pour concevoir des habitats attractifs alliant durabilité, tradition et modernité.

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