Le Figaro – – mis à jour

La «transformation» tous azimuts des entreprises renferme certains paradoxes: ainsi, si la transformation digitale est une priorité, les attentes «humaines» des jeunes cadres dirigeants sont plus importantes.

«La transformation est un non-sujet. Une entreprise qui n’évoquerait pas le sujet de transformation, je la qualifierais d’irresponsable. C’est une nécessité absolue pour la survie des entreprises», lance Anita Pouplard, associée chez Boyden. La forme que prend cette transformation, en revanche, semble être un sujet qui ne fait pas l’unanimité. L’étude* menée par l’IFOP met en exergue le grand écart entre la transformation qui s’opère en entreprise et les souhaits de transformation des cadres.

«Il y a un petit décalage de conception sur le contenu de la transformation», confirme Frédéric Dabi, directeur général adjoint de l’IFOP. Le digital, principal facteur de transformation au sein des entreprises ces dernières années, est connoté positivement pour 86% des cadres mais est en léger recul par rapport à 2018 (90%). «C’est le début du désenchantement de la part du salariat français et des cadres sur le tout-digital», selon le directeur adjoint. «La transformation digitale n’est pas forcément une forme de rejet mais se diffuse dans les entreprises, conteste Anita Pouplard, associée chez Boyden. Petit à petit, ça devient un phénomène classique qui justement ne fait plus peur.»

Le terme de transformation est connoté «très positivement» pour seulement 14% des interrogés et «positivement» pour 69%. Presque la moitié (49%) des jeunes cadres dirigeants considère, en effet, la transformation comme une opportunité contrairement à un individu sur quatre qui se dit «inquiet» ou encore «septique» et «méfiant» face au changement. Ainsi, les jeunes cadres dirigeants ne semblent pas contre la transformation mais l’étude démontre que leurs attentes ne sont pas conformes au changement qui s’opère actuellement dans les entreprises.»

Dialogue, développement collaboratif et responsabilisation

L’axe majeur de transformation est numérique mais ne correspond pas aux attentes des jeunes cadres dirigeants. Ils souhaiteraient, en premier lieu, voir une transformation s’opérer du côté du dialogue, du développement collaboratif et de la responsabilisation. «Ce décalage n’est pas contradictoire, souligne Anita Pouplard. Ce sont les outils digitaux qui entraînent de nouveaux modes opératoires et donc le besoin de s’exprimer et d’échanger davantage.»

Autrement dit, les jeunes cadres dirigeants cherchent à mettre l’humain au cœur des préoccupations des entreprises dans un climat collaboratif et de confiance. Or, dans la réalité, seulement 6% des sondés constatent que la transformation de leurs entreprises porte sur ces sujets. «La digitalisation ne semble pas correspondre à une attente majeure de nos cadres dirigeants. Sur les autres aspects, le compte n’y est pas, commente Frédéric Dabi, mais nous ne sommes pas sur deux mondes irréconciliables.»

Afin de répondre à ces nouvelles attentes tout en se digitalisant, les entreprises doivent prôner la vision partagée en impliquant les nouvelles générations dans les projets menés. «Il s’agit de faire réfléchir ensemble différents profils autour de projets communs, termine l’associée de Boyden. Sortir de la définition classique des postes plaît à cette génération.» Les jeunes cadres dirigeants restent, en effet, optimistes: plus de huit individus sur dix (82%) pensent que les entreprises françaises sont capables de réussir leur transformation. 73% pensent même que les effets de ce changement seront «positifs».

*L’enquête a été menée en ligne, du 25 mars au 4 avril 2019, auprès d’un échantillon de 712 cadres dirigeants âgés de 35 à 45 ans, issus d’un échantillon global de 3009 personnes, représentatif des cadres actifs au sein d’entreprises de 50 salariés et plus.

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